« Retour Des bisounours

Pour repousser encore les limites de la prospective, la réflexion de l’urbaniste se doit parfois de faire une place à l’utopie. Deux degrés revendiquant une expertise pointue et avant-gardiste, nous nous devions d’envisager l’utopie ultime,un monde fait de bonheur, de communion avec la nature et d’élévation des esprits vers la gentillesse la plus totale. Après un bref examen de ce cahier des charges, il ressort que cette utopie avait déjà été imaginée : le monde des Bisounours.

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Les Bisounours habitent le Jardin des bisous, un ensemble de nuages reliés par des arcs-en-ciel. Parfois, ils prennent leurs auto-nuages pour aller pique niquer dans la Forêt Toutamour ou pour aller dans le monde des humains réconforter des enfants tristes. Ils se réunissent régulièrement au Palais des cœurs pour décider quel enfant triste ils doivent secourir et quelle équipe est envoyée en mission. En effet, les Bisounours sont tous pourvus d’un dessin mignon sur leur ventre, qui a un rapport avec leur nom et leur confère une faculté particulière par le biais d’une sorte de rayon ventral. Par exemple, Grosdodo, avec une lune et une étoile sur le ventre, aide les enfants à dormir sans faire de cauchemar (cette faculté étant exclusive, impossible pour Grosgâteau de se passionner pour la cuisine du canard gras, ou pour Grosbisou de se prémunir contre la grippe A en évitant les contacts physiques). Lorsqu’ils balancent leurs rayons simultanément, ils produisent un arc-en-ciel qui rend tout le monde heureux et gentils, même les méchants (l’équipe du Professeur cœur de pierre ou celle du Sorcier sans cœur).

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L’épisode suivant donne une idée des améliorations que les Bisounours peuvent apporter à la ville :

http://www.megavideo.com/?d=AL9WS7N4

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Le monde des Bisounours est une utopie inaccessible. Et pourtant, si l’on s’amuse à remplacer quelques termes, son influence apparaît dans l’urbanisme contemporain :

Jardin des bisous = écoquartier

Arc-en-ciel = cheminement doux

Auto-nuage = véhicule hybride

Réunion du Palais des cœurs = démocratie de proximité

Forêt Toutamour = espace vert urbain

Bisounours = Bobos habitant un éco-quartier

Gentils humains = population extérieure rêvant d’écoquartier

Méchants = individus insensibles au tri sélectif

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Selon cette nouvelle perspective, le Sorcier sans cœur, vivant dans un château gris, entouré de glace et emprisonnant les enfants, apparaît comme un promoteur adepte du béton et boudant les normes HQE jusque dans ses odieuses cimenteries.

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En poussant cette logique, nous pourrions proposer de nouvelles icônes aux écoquartiers, telles que Grospopo, un Bisounours qui facilite le transit des personnes qui mangent des légumes bio et qui traite ensuite leurs eaux usées, ou Grosclodo, spécialiste du tri et du recyclage des déchets.

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Relevons tout de même qu’au quotidien, les Bisounours tuent le temps en se gavant de gâteaux (issus de l’agriculture biologique et du commerce équitable) et en allant emmerder des gamins (de préférence occidentaux et blancs), qui ne leur ont rien demandé, avec la prétention de leur apprendre à vivre. Le monde des Bisounours est une utopie qui anticipe surtout la « ville chiante » et ça, ça donne à réfléchir sur les écoquartiers.